Conférence sur « Femmes et religions » : Dr. Asma Lamrabet

Conférence sur « Femmes et religions » : Dr. Asma Lamrabet
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 Conférence sur « Femmes et religions » : Dr. Asma Lamrabetappelle à Montréal à se départir d’une lecture « patriarcale » du religieux érigé en sacré immuable

Montréal, 21/04/2017 (MAP)- L’auteure et directrice du Centre d’études et de recherches féminines en Islam au sein de la Rabita Mohammadia des Oulémas du Maroc, Dr. Asma Lamrabet a appelé, jeudi soir à Montréal, à se départir d’une lecture « patriarcale » du religieux érigé en sacré immuable et de repenser une spiritualité féminine universelle au sein d’une mondialisation dépouillée du « sens de la vie ».

« Il s’agit donc de redécouvrir l’infinité des horizons spirituels qui nous unissent en tant que femmes victimes d’une lecture patriarcale du religieux érigé en sacré immuable. Il s’agit aussi de repenser une spiritualité féminine universelle au sein d’une mondialisation dépouillée du +sens de la vie+ », a souligné Mme Lamrabet lors d’une conférence-débat organisée par le centre culturel marocain « Dar Al-Maghrib » sous le thème « Femmes et religions, point de vue de femmes du Maroc ».
Selon Mme Lamrabet, auteure de plusieurs écrits sur l’Islam et les droits universels des femmes, cette spiritualité universelle permettra aux femmes de chaque tradition religieuse de renforcer leurs luttes communes envers toutes les discriminations, à partir de leur propre référentiel culturel enrichi par l’apport des autres expériences spirituelles.
Lors de cette conférence, initiée en partenariat avec l’association « Mémoires et Dialogue », Mme Lamrabet a indiqué que l’image « dépréciative » envers les femmes est ancienne et profondément enracinée dans les sociétés humaines et ce quelque soit le contexte culturel, ajoutant que l’on retrouve dans toutes les traditions religieuses une vision commune « androcentrique » et une « représentation stéréotypée » des femmes, reléguées dans des grilles de lecture misogyne où il est de bon ton de les mépriser au nom du sacré.
Elle a précisé que les religions monothéistes, entre autres, se sont greffées sur un terreau structurellement patriarcal, relevant que malgré les tentatives de réformes apportées par les prophètes de chaque voie spirituelle, ces religions se sont accommodées des codes sociaux et des coutumes traditionnelles dans lesquelles elles se sont projetées.
Toutefois, a poursuivi Mme Lamrabet, il faudrait toujours savoir garder en tête les deux dimensions -spirituelle et institutionnelle- autour desquelles s’articulent le « religieux », même s’il est certes aujourd’hui difficile de faire la part des choses entre ces deux dimensions devenues forcément imbriquées avec le temps, expliquant que toute notion de religion implique un contenu spirituel, celui de l’expression personnelle -et ou collective de la foi et des croyances – et un contenu institutionnel représentatif des « systèmes religieux ».
Ces systèmes religieux, édifiés en institutions exclusivement masculines, ont largement puisé dans les sources scripturaires, afin de construire un discours qui a établi une hiérarchisation des sexes en justifiant l’inégalité et la soumission des femmes au nom du religieux, a-t-elle mentionné.
Et l’oratrice de faire constater que malgré les grandes batailles gagnées et les grandes avancées et acquis de l’émancipation des femmes au sein du monde moderne, l’idéal égalitaire est encore loin d’être établi et l’oppression des femmes n’a pas totalement disparue, notant que de nombreuses femmes appartenant aux différentes religions monothéistes ont, depuis de nombreuses années maintenant, décidé de se réapproprier le religieux et de déconstruire la lecture patriarcale qui les a marginalisé de l’histoire.
« Elles ont ainsi compris que ce n’était pas, à proprement dit, le message spirituel de leurs traditions religieuses respectives qui les opprimaient, mais bien son instrumentalisation par les différents systèmes et institutions religieuses », a-t-elle soutenu.
Elle a, par ailleurs, ajouté qu’en Islam et grâce à différentes recherches théologiques et académiques approfondies, avec des arguments coraniques à l’appui, de nombreuses interprétations imputées de façon erronée aux Textes Sacrés ont été complètement réfutées, estimant que cette relecture a permis de dénoncer tous ces soit disant interdits religieux envers les femmes qui n’existent tout simplement pas dans les Textes sacrés mais dans la longue tragédie historique d’une lecture de l’Islam restée otage de ses propres dérives séculaires.
Selon elle, cette nécessité de revisiter la tradition islamique est aujourd’hui de l’ordre de l’impératif démocratique.
Elle a affirmé que l’exemple aujourd’hui du travail effectué dans ce sens par le centre de paix et de l’interreligieux -dirigé par une femme- au sein de la Rabita des Oulémas du Maroc est intéressant et porteur d’espoir, expliquant qu’il s’agit d’un centre affilié au sein d’une institution religieuse officielle et qui, conformément au grand projet de réforme du champ religieux initié par SM le Roi Mohammed VI, ouvre la voie à une réflexion commune sur les valeurs éthiques qui nous unissent et au débat respectueux des divergences dogmatiques.
Notant que malgré les divergences concrètes dans le vécu, l’historique et les dogmes propres à chaque religion, la question des femmes constitue un point commun, récurrent et transcendant de façon implacable la diversité religieuse, chaque système religieux s’étant employé à travers l’histoire à reléguer les femmes dans les bas fonds d’une subordination éternelle, Mme Lamrabet a indiqué que « cette conception patriarcale universelle commune à toutes les lectures religieuses doit aujourd’hui, en tant que femmes adeptes ou non des religions, nous faire sortir de nos particularismes culturels et religieux ».

(MAP)

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